Lors d'une balade dans le Ghetto, j'ai découvert la boulangerie Volpe (Cannaregio 1143, Ghetto vecchio) qui met en vitrine des pains azymes si jolis que j'en ai achetés pour un ami et des galettes étiquetées… pain azyme sucré. Intriguée, j'en ai goûté … surprise, c'était si bon que je suis retournée en racheter d'autres, dont celle-ci, la survivante… truffée comme ses jumelles de graines de fenouil.
De retour en France, je me suis plongée dans mes bouquins de cuisine et sur internet.Les recettes les plus proches que j'ai d'abord dénichées sont celles des fameux canistrellicorses (à base d'huile d'olive et d'anis) … mais il y a de la levure dedans or, qui dit pain azyme dit pâte non levée (sans sel ni graisse animale). L'enquète s'est poursuivie dans le «Livre de la cuisine juive» une somme de Claudia Roden (Flammarion/Métropolis), où j'ai découvert une recette de "kicheleh" biscuits à l'huile sans levure… mais sans anis, faits pour être offerts après un repas de viande ou laitier. Troisième tentative: dans «Venise exquise,histoires gourmandes et recettes» (Payot), Jean Clausel -grand amoureux de la ville et grand gourmand- donne une recette de biscuit vénète: le schizoto (à base de pâte non levée) qu'il décrit comme "une sorte de fougasse sans levure" et qui se décline en salé ou sucré… Or dans la version sucrée … bingo, il y a des graines de fenouil (mais aussi de la cannelle). Partant de ces trois pistes, j'ai bricolé une recette. La première tentative n'a pas été mal, mais la pate a collé abominablement aux mains, et comme je ne voulais pas trop la travailler, je l'ai tant bien que mal étalée… D'où, dans cette première version, ces biscuits légèrement rebondis, aux allures poissonesques… et aux graines d'anis, ce que j'avais sous la main. Néanmoins, les proportions me paraissaient à peu près bonnes, car à la dégustation, ils tiennent la route.
Après un deuxième tour sur internet, j'ai déniché sur un blog que j'aime bien, «Le hamburger et le croissant» une autre recette qui s'approche un peu des galettes vénitiennes (mais avec du beurre en bonne quantité, donc pas du style pain azyme… )… Son grand intérèt: elle donne le tour de main qui me manquait pour que ces biscuits aient une allure à peu près présentable… à savoir entortiller la pate une fois terminée dans un film alimentaire, la façonner en boudin et la glisser au congélo poiur la durcir… Sauf qu'après l'avoir placée au froid et l'avoir tatée toutes les 20mn, elle ne se raffermissait pas, la bougresse… J'ai augmenté le froid. Au bout de deux heures, elle avait très mollement durcie. En la roulant dans la farine, j'ai quand même pu la façonner…
Voilà le résultat, plus esthétique que le précédent, toujours plus dodu que la svelte vénitienne, très bon aussi … Pour l'instant, j'en reste là…
Proportions 270g de farine T65, 50g huile d'olive 80g de sucre, 3 œufs, 5g de Pastis Bardoin (très parfumé, mais pas kasher, tant pis… c'est pour suivre l'idée du vin blanc dans les canistrelli) 15g de graines de fenouil
Préparation Mixer rapidement au batteur électrique les œufs avec le sucre Ajouter l'huile puis le pastis en battant (au batteur électrique, c'est moins fatigant… ) juste pour incorporer. Il ne faut pas travailler la pâte Ajouter la farine, battre rapidement Rabattre le reste de la farine qui resterait collée aux parois du saladier vers le centre à l'aide d'une spatule Incorporer les graines de fenouil à la spatule Etaler un film alimentaire sur une surface plane. Verser toute la pâte à l'aide de la spatule, refermer le film, le modeler en forme de boudin et le glisser au congélateur. Penser à autre chose et prendre patience. Au bout de 2 heures, allumer le four à 180°. Sortir le boudin, le poser sur un plan de travail au préalablement fariné. Le rouler dedans et le séparer en six ou sept boules. Fariner chaque boule avant de l'étaler. La découper de façon régulière, par exemple avec un moule à tartelette. Poser les galettes sur une plaque revétue de papier sulfurisé. Glisser au four pour 30mn. (Jusqu'à ce que les galettes aient bien doré). Eteindre, laisser les galettes encore quelques minutes au four avant de les sortir Les laisser refroidir sur une volette (j'adore ce mot: c'est une grille à gâteau ronde).
J'ai fait faire une dégustation à mes convives, et là surprise… il y a eu des amateurs pour chaque variété. Ce n'est pas l'esthétique qui a été déterminante, mais l'attirance pour l'anis (plus sucré) ou le fenouil. J'indique donc aussi les variations pour la première fournée. L'anis étant plus sucré au goût que le fenouil, je n'avais mis que 70g de sucre (au lieu de 80g). J'avais aussi mis moins de farine -250g au lieu de 270g- et fait cuire 5mn de moins. Ayant conservé comme témoin l'une des fameuses galettes du Ghetto, nous avons aussi constaté: -qu'elle est plus sucrée -et plus sèche (elle date aussi de plus de quinze jours)
En tout cas, bonne nouvelle, -outre leur goût très agréable- ça semble de vaillantes galettes à toute épreuve… à fabriquer donc avant de partir en vacances si on veut emporter un peu de douceur avec soi… NB: pour qui aime faire trempette dans sa tasse de thé avec des biscuits, ces galettes ont une consistance appropriée: elles plient à peine… sans se rompre sur le champ.