Des plantes au parfum, des voyages, des inspirations culinaires ou botaniques
28 Avril 2013
Je viens de passer quelques jours sur l'île d'Islay, au large de Glasgow, réputée pour ses whiskies au parfum de tourbe. Avant mon départ, j'avais lu qu'on avait parfois utilisé le myrique baumier dans l'élaboration de bières. Sur place, j'ai vraiment œuvré pour trouver cette plante. J'y suis arrivée… non sans mal.
Islay est un paradis pour les âmes solitaires qui apprécient les fermes isolées
Faire des recherches sur le myrique via internet est un vrai sport, car il se dissimule sous de multiples appellations:
en français: myrique baumier, galé odorant, myrte des marais, myrte batard, piment royal, piment aquatique, etc ; au Canada bois-sent-bon.
en langue anglaise: bog myrtle, sweet gale, scotch gale
en gaélique: roid
en latin: myrica gale
Les moutons ont été plus faciles à trouver que le myrica gale
C'est une plante intrigante de la famille des myricaceae, dont on utilise -avec prudence- toutes les parties: graines, feuilles, rameaux, châtons, racines … à titres divers. Elle est notamment tenue pour abortive, sudorifique dans les pneumonies, ayant une action astringente, active dans les maux d'estomac, les problèmes hépatiques, et peut être avec des propriétés anti-cancéreuses. Elle a des effets insecticides et herbicides.(Voir par exemple à ce sujet l'article de wikipedia, en anglais, bien plus complet que la Vf, pour laquelle j'ai fait un lien sur myrica gale). Elle favoriserait aussi les rêves lucides, motif qui, il y a quelques années, avait attiré mon attention…
Au milieu des roseaux, l'île d'Eileen Moor, sur le Loch Finlaggan. Au Moyen age, elle fut le fief des MacDonald, les seigneurs d'Islay.
En cuisine, on peut l'employer en substitut du laurier dans les sauces, en prenant soin d'ôter les feuilles en fin de cuisson pour éviter l'amertume. Elle contribuait à parfumer la bière avant l'emploi du houblon, dans des mélanges de plantes baptisés gruit ou grut. Certains s'amusent encore à en faire des macérations alcooliques… à boire.
Les graines auraient un parfum de muscade .
Un bog myrtle rougeâtre, planqué dans les broussailles
En dermato, la marque Boots l'emploie dans une ligne cosmétique pour ses effets anti-oxydants et anti-bactériens (contre l'acné notamment). En Grande-Bretagne, on trouve d'ailleurs de nombreux savons, artisanaux ou pas, qui en referment mais c'est surtout son action insecticide contre les midges (ces mini-insectes piqueurs et terriblement envahissants présents dans les pays scandinaves, au Canada, en Ecosse ou en Irlande pendant l'été) qui semble intéressante.
Ses feuilles au puissant parfum balsamique secrètent une résine. Elle ont aussi une grande force tinctoriale même sans avoir à mordancer la laine. Elles donnent un ton jaune en début de saison et du vert à l'automne, comme me l'a expliqué une artisane d'Islay qui s'en sert.
On utilisait également la cire extraite des fruits pour fabriquer des bougies (probablement un travail de patience, vu leur taille menue… ).
C'est un végétal très costaud qui apprécie les lieux humides, landes et tourbières, et résiste aux intempéries et à la pauvreté des sols.
Sur le net, on peut trouver de l'hydrolat, de l'huile essentielle, de la teinture-mère (d'écorce des racines), des dilutions homéopathiques, voire des feuilles ou des graines séchées, mais en Ecosse et au Canada -sauf pour la teinture mère et les produits homéopathiques.
J'ai donc sillonné Islay pour en dénicher, d'abord en vain car je cherchais à identifier les feuilles. C'était trop tôt. Un truculent guide qui se rappelait où il en avait ramassé quand il était gamin a retrouvé l'endroit… et m'a montré quelques plants à la tige rougeâtre, sans l'ombre d'une feuille, mais porteurs de minuscules chatons orangés (les chatons mâles). Les chatons femelles arborent un plumet rouge; j'ai donc ramassé quelques branchettes qui macèrent déjà dans de l'alcool (les chatons d'un côté, les tiges légèrement écrasées de l'autre).
Une part de ma modeste récolte
J'espère en tirer un peu du parfum des landes d'Islay.
J'avais acheté il y a pas mal de temps déjà de l'HE en GB. Je l'ai utilisée à l'occasion dans certaines recettes (dans un savon par exemple ici ou dans un baume bleu pour les pieds qui ne voulait pas prendre… ici).
En son temps, Pescalune avait préparé un lait corporel parfumé au myrique baumier avec un hydrolat et une HE achetés en Bretagne auprès de Clément Pallier (voir ici). Le site de Pallier (www.ferme-kermorvan.com) semble hélàs en ce moment en repos.
Michèle avait également proposé sur Potions "myrica rose", une crème pour le visage et les mains avec du myrica gale.
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