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Des plantes au parfum, des voyages, des inspirations culinaires ou botaniques

Kérala 3: piper nigrum

References des textes en fin d'article
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Il est temps de parler botanique et d’approfondir l'âme du poivre. C'est Carl von Linné, le grand naturaliste suédois qui a baptisé le poivre piper nigrum le classant dans la famille des pipéracées. Comme la vigne, il s’agit d’une liane dont la nature grimpante exige un tuteur pour assurer son développement qui peut atteindre une dizaine de mètres de hauteur. Ses feuilles persistantes, épaisses et brillantes ont la forme d'un cœur allongé à moins que ce ne soit d’un as de pique. Leurs tailles varient selon la variété. De trop grandes feuilles dissimulent les grappes de poivre à la vue, rendant la cueillette plus difficile. Plante tropicale, le poivrier est particulièrement exigeant. Il aime le soleil mais pas trop, préférant une lumière tamisée apportée par l'ombre de grands arbres. Il exige une humidité importante et des températures annuelles élevées (de 20 à 40°) pour assurer son développement. Au moment de la floraison, la liane se couvre de fleurs, chatons blancs jaunâtres, fins et délicats. Au bout de 3 mois, apparaissent des grappes de 20 à 30 grains attachés autour d'une tige. D'abord verts, ces grains virent au jaune puis au rouge au fur et à mesure de leur murissement. Le poivre vert est ramassé en début de maturité. Il est consommé frais ou conservé dans du vinaigre ou de la saumure. Pour le poivre noir, les baies sont récoltées à mi-maturité quand leur teinte verte commence à rougir. Le séchage au soleil les mènera au noir. Quant au poivre blanc, il exige la maturité des grains. Un trempage puis un séchage permettra d'éliminer la pellicule extérieure pour ne garder que le cœur de l'épice.

«Dans la région de Munnar, nous utilisons du silver oak comme tuteur, nous a expliqué un paysan. L’arbre pousse très droit et présente une écorce rugueuse qui permet à la liane de s'accrocher. Certains planteurs utilisent aussi des murike à la peau épineuse, parfaite pour soutenir les poivriers». En ce mois de février, la récolte du poivre bat son plein sur les contreforts des ghâts du Kérala. Dans le George Spice Garden à Ambica, on cultive des épices mais aussi du café. George, le propriétaire lance tout net : «au fond, le poivre est une plante simple et solide. Il se contente de l'eau du ciel. Ici, la récolte commence en janvier pour se terminer à la fin mars. Elle se passe par tris effectués toutes les deux semaines. Les ramasseurs commencent par le bas de la plante avant de terminer juchés sur des échelles». De loin en loin sur la SH 19 qui descend vers le sud, on voit en effet des cueilleurs perchés dans les arbres. Quand la route regrimpe, la nature des cultures change. Des marchands brandissent même des bottes de carottes nouvelles, légume exotique pour la latitude tropicale. En redescendant dans la vallée vers le parc national de Periyar, les épices réapparaissent, et nous pénétrons dans la terre promise de la cardamome. Les lots les meilleurs prennent le nom d'Allepey Green Cardamom et voyagent dans le monde entier pour parfumer les cuisines et les pâtisseries les plus raffinées. Le poivre se fait plus discret mais il reste présent : il sèche sur des bâches de plastique étendues le long des routes. Pas terrible pour l'hygiène. On en vend dans les petites boutiques de souvenirs de Kumily, village assailli par les touristes indiens qui vont visiter le parc naturel de Periyar.

- C'est du poivre de Malabar ?

- Pas du tout répond un jeune vendeur, c'est du karimunda. Pour le poivre de Malabar, il faut aller à Sultan Battery, sa vraie capitale, dans la province de Wayanad, plus au nord du Kérala.

 

Références des textes en haut de l'article

 

1. Thirugnanam, Akbarsha and Krishnamurty: Indian medicinal plants and Home remedies (ed. Selvi Pattipaham)

 

2. Nicolas Culpeper: Culpeper's complete herbal (reprint Foulsham & co d'une édition du XVII°siècle). Il y a longtemps, j'ai longuement parlé sur ce blog ici de cet herboriste anglais cher à mon coeur car il a rendu plus accessible la pharmacopée anglaise. 

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M
Culpeper le bien nommé ici ^_^<br /> C'est étonnant que l'on considère d'une part que le poivrier est exigeant et que George le planteur le qualifie de plante simple et solide.<br /> Tu donnes envie de chausser ses bottes et d'aller chercher du poivre!
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V
Michèle, <br /> Le poivre est exigeant car il lui faut à la fois chaleur et pluie. En revanche, il est beaucoup moins sensible aux attaques diverses (champignons, insectes, etc) que le piment, souvent très traité. <br /> C'est en ce sens qu'il est simple et solide.