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Des plantes au parfum, des voyages, des inspirations culinaires ou botaniques

Bouillon de convalescence

le bouillon au démarrage, et après la cuisson, (pas encore filtré).
le bouillon au démarrage, et après la cuisson, (pas encore filtré).

le bouillon au démarrage, et après la cuisson, (pas encore filtré).

 

J'ai découvert un peu par hasard sur le web un site merveilleux consacré à la diététique chinoise, site bien trop  court hélàs. L'austérité du mot diététique ne rend pas compte du bonheur de lire les histoires racontées par un anthropologue, François Lupu, notamment spécialisé sur l'alimentation des personnes (très) âgées en Chine. Ouh là, ce thème peut également paraitre rébarbatif. Eh bien non, car François Lupu raconte la Chine à table en une douzaine de textes, et à travers une poignée de personnages qu'on aurait envie de tous rencontrer. 

Voici le lien vers ces récits publiés en 2010-2011:

ici

Précipitez-vous, c'est un régal.

Il y a le professeur Zheng, un ancien instituteur qui survécu aux excès mortifères du maoïsme des années soixante-dix. Le professeur se nourrit exclusivement de bouillies de toutes espèces, rappel constant de ses années noires. Mais il s'agit désormais de "bouillies de luxe", dont il en a fait un art de vivre. Son récit est magnifique et François Lupu révèle le détail de quelques préparations. il y a Madame Fang, une cuisinière ambulante qui avait épousé un soldat japonais lors de l'occupation nipponne de la Mandchourie en 1931. Elle décrit, délicieuses recettes à l'appui, comment elle essaya de composer avec les goûts de son mari, sans décevoir trop ses propres préférences. Une réflexion aussi lumineuse que virtuose sur les différences culturelles décryptées à travers le choix des poireaux, la cuisson du riz ou l'emploi du gingembre. Il y a aussi Xiaomei "la maman chinoise" de François Lupu, sa voisine de palier quand il était petit, celle qui lui ouvrit la porte du monde chinois. On découvre encore grand-mère Li, 96 ans, qui a toujours "réussi à nourrir sa famille", quelques soient les soubresauts de l'histoire,  devenue peu à peu "une sorte de « cuisinière de santé » pour ses voisins et même son quartier, toujours prête à préparer une cuisine adaptée à la bonne convalescence d’untel ou d’untel. Elle aimait ce « métier ». Et cela lui rapportait quelques yuans qui arrondissaient une retraite si maigre qu’elle en était quasi inexistante", écrit François Lupu, qui a souvent séjourné en Chine.

Pour une copine sortant d'une semaine d'hospitalisation après une pneumonie, j'ai préparé un des "bouillons de convalescence" de grand-mère Li. Je lui en ai porté dans un thermos en même temps que la recette retranscrite pour qu'elle puisse en refaire. 

Le résultat est du tonus à l'état pur.

Les ingrédients du bouillon (de g à d et de h en bas): Deux bols de chou chinois haché avec tronçons de concombre pelés et sans pépins. Un bol de pluches de coriandre (le plus long à préparer). Le demi-citron (bio mais quand même à la peau bien savonnée et rincée) avec le gingembre haché, le poivre du Sichuan laotien et la demi gousse d'ail dégermée, les champignons noirs réhydratés, les flocons de piment  italien, le tamari (sauce soja) que j'utilise, peu salé.

 

Voici les proportions données par l'anthropologue:

"Dans un demi litre d’eau, faire cuire à petit feu pendant trente minutes (après les premiers frémissements de l’ébullition) cinq grammes de gingembre frais haché, une demie gousse d’ail, cent grammes de feuilles de chou chinois, cinquante grammes de champignons noirs, cinquante grammes de concombre, cinq grammes de piment rouge haché, cinquante grammes de coriandre fraîche, vingt grammes de sauce de soja, un demi citron, une pincée de poivre de Sichuan. Une fois la cuisson terminée, faire infuser une bonne heure. Filtrer pour ne garder que le bouillon, faire réchauffer lentement pour obtenir un bouillon plus tiède que chaud. Boire lentement en se concentrant sur les saveurs."

J'ai donc tout pesé et réuni.

Quelques remarques:

-50g de coriandre fraiche correspondent à environ un bouquet.

-J'ai pesé les champignons noirs une fois réhydratés à l'eau bouillante, sinon, ils auraient débordé de la casserole!

-Je n'ai pas trouvé de piment rouge entier frais bio, j'ai remplacé par une demi cuillère à café de flocons de piments italiens (le bouillon déménage).

-Pour le poivre du Sichuan, j'en avais rapporté du Laos l'an dernier, du vrai mais en version poivre sauvage, un cadeau précieux dont j'use avec parcimonie.

-Comme il n'y a qu'un demi litre d'eau et que tous les ingrédients hachés occupent un certain volume, prévoir une grande casserole.

-J'ai laissé macérer une demi-heure seulement après cuisson car le piment arrachait (impossible d'ôter les flocons éparpillés). 

-Couvrir pendant la cuisson pour éviter l'évaporation, sinon, il ne restera plus rien.

Après avoir filtré, on obtient un beau liquide d'un ton très ambré, que j'ai complètement oublié de photographier.

Par curiosité, j'ai gardé les légumes cuits au frais, j'ai récupéré les champignons, les ai coupés en petits morceaux, les ai fait sauter à la poële, et me suis régalée.

 

Le lien vers le texte consacré à grand-mère Li où sont également donnés les pourquoi du choix des ingrédients:

ici

Un seul extrait, délicieux, et pour mettre en appétit (de lecture):

. "Souvent, quand le foie et l’estomac ne s’entendent plus, c’est que la fatigue d’après la maladie, la fatigue rend triste, un peu anxieux. Pendant une convalescence, on est souvent un peu triste, pas trop, mais un peu, et du citron dans un bon bouillon enlève un peu la tristesse. Parce que ce n’est pas une vraie tristesse, mais l’envie de ne pas terminer la convalescence, l’envie de rester toujours convalescent. C’est normal : la convalescence, c’est comme être encore une fois un enfant »

 

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venezia


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N
Ca donne envie ! Au laos, j ai appris à utiliser toutes les parties de la coriandre, surtout cuite. Ca va plus vite, et les tiges sont tendres, même crues.<br /> Tes photos sont très belles, et à te lire, on plonge dans la Chine ancienne, celle qui me faisait rêver. ...
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V
Les articles de François Lupu sont extraordinaires, je trouve. J'ai cherché en vain d'autres textes de lui, j'ai même tenté- en vain aussi- de le contacter.
M
Nul besoin d'être convalescente pour savourer ce bouillon, un coup de pompe et rien que de lire la composition de ce bouillon tout l'organisme frise de bonheur et de chaleur.<br /> Le blog de ce Monsieur est un pur bonheur bref mais intense.<br /> Ton article est savoureux à tout point
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S
Tres bel article qui donne envie de faire cette soupe et d aller plus loin ...je fais souvent des bouillons de legumes un peu epices ou de volaille , maison évidemment :)que j apprecie beaucoup. <br /> <br /> La cuisine chinoise est complexe mais prend toujours en compte le tempérament de la personne me semble t il .<br /> J avais zappé cet article : c etait bien dommage .
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V
Sylvie, oui, le choix des plats en cuisine chinoise n'est pas simple: il faut aussi tenir compte de la saison, de l'équilibre des saveurs entre les divers ingrédients, du tempérament de la personne, un vrai casse-tête!
M
Excellent, bourré d'informations sur ces bouillons qui constituent aussi la base de très nombreuses cuisines du Monde, à commencer par la française, on l'oublie souvent.<br /> <br /> J'ai toujours des carcasses de volailles achetées chez le volailler au marché ainsi que des épluchures de légumes qui finissent en potages ou bouillons pour les sauces.<br /> Je vais lire les liens.
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V
j'ai pensé à toi, si amatrice de soupes et de bouillons… Lis, tu vas te régaler
L
Merci, merci, merci Vénézia pour toutes ces découvertes! <br /> Je garde précieusement cette recette et vais la partager c'est certain.<br /> Bon, je m'en vais découvrir les belles histoires! Bises.
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V
Coucou Loulou, <br /> <br /> Tu vas voir, ce bouillon est un vrai tonique, et plutôt simple à faire, je trouve
M
Chère Venezia, un grand merci pour cet article qui me parle énormément ! La philosophie de vie de Grand-Mère Li m'a touché par sa vérité. Ce qu'elle dit sur la maladie et la convalescence est une petite révolution. Je vais aller lire le reste des articles de Mr Lupu et oui dommage qu'il se soit arrêté. <br /> Je t'embrasse du fond du cœur et te remercie pour tes si bon conseils. Mariebaume
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M
Je viens juste d'avoir accès à ta réponse en m'inscrivant à nouveau à ta news letter !<br /> Je n'ai pas encore fait le bouillon car il me manque la coriandre et j'ai pris des shiitakés à la place des champignons noir introuvable chez bio-coop. J'ai l’impression d'être toujours en train de me remettre de quelque chose, alors ça tombe à pic ! <br /> En amitiés <br /> Mariebaume
V
Ma chère Maribaume, <br /> <br /> Je suis si contente de te lire! Moi aussi, la philosophie de grand mère Li m'a beaucoup touchée. Ce bouillon retape vraiment si j'en crois la copine pour qui je l'ai préparé. <br /> Je suis également ravie que tu aies réussi à laisser un commentaire sur ce blog, ce qui semble, si j'en crois les messages que je reçois, de plus en plus problématique. Malheureusement, je ne sais pas comment corriger les divers bugs.