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Des plantes au parfum, des voyages, des inspirations culinaires ou botaniques

Sarawak 4: poivre blanc

Le fort de Kuching en 1864 ( image de Illustrated London News, 1864, présentée dans le livre Les Rajahs blancs, dejà cité)

Le fort de Kuching en 1864 ( image de Illustrated London News, 1864, présentée dans le livre Les Rajahs blancs, dejà cité)

La balade dans les rues de Kuching laisse penser que les Chinois ont pris le pouvoir au Sarawak. Constituant plus de 50% de la population, ils semblent détenir tous les commerces. Avec une émigration qui avait commencé en 1743, les Hakkas forment la plus ancienne communauté chinoise du pays. L'ethnie qui vient du Fujian au sud-est de la Chine a toujours défendu avec véhémence l'originalité de sa culture, notamment son goût pour les livres et l'éducation. Arrivés à Bornéo pour extraire de l'or, ils sont souvent devenus planteurs de poivre.

 

Monsieur Jong Sui San habite Perigi près de Lundu, gros bourg agricole à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Kuching. La maison moderne et de plain-pied est confortable, vaste et bien éclairée, elle affiche sans détour la prospérité du planteur. Un homme costaud aux épaules impressionnantes qui parle du poivre avec passion. Il nous emmène dans son 4/4 Toyota sur une piste argileuse qui n'en finit pas de grimper au travers d'une végétation luxuriante. La plantation apparaît enfin. Le paysage est fantastique. Au fond, une haute falaise couverte de fougères et de plantes, au loin, la mer de Chine, indigo et attirante. Entre les deux, la poivrière occupe des coteaux qui se situent à la limite d'un parc national où pousse la rafflésia, la plus grande fleur du monde. Elle peut atteindre un mètre de diamètre et peser dix kilos.

- Je travaille dans le poivre depuis 40 ans confie le planteur. Ces plants, je les ai installés voilà huit ans. Et croyez-moi, c'est une sacrée entreprise. Il a fallu couper les arbres de la forêt primaire, extraire des racines, préparer la terre, défricher... Un vrai travail de pionnier. Et j'ai recommencé voilà un an pour couvrir au total une surface de huit hectares.

Le sol, assez léger apparaît argilo-sableux, une terre qui absorbe bien la lumière. Les plants espacés de 2,50 mètres atteignent 3 mètres de haut.

- Ils s'enroulent sur des tuteurs de bois de fer précise Jong Sui San. J'ai retenu la variété kuching, un poivre qui donne correctement, parfait pour le blanc. Les botanistes nous en proposent maintenant de nouvelles, comme le semongok perak et le semongok emas qui résistent bien aux maladies, je suis tenté de faire un essai.

La récolte ne commencera qu'en juin, la plantation ne produit en effet que du poivre blanc qui exige des baies arrivées à maturité, elles sont alors bien rouges.

- J'emploie 7 à 8 personnes pour la récolte, explique le planteur. Elle s'étale sur environ deux mois et demande trois passages pour respecter la maturité. Pour obtenir du poivre blanc, on enferme les grappes bien mûres et non éraflées dans des sacs de jute d'une cinquantaine de kilos. Ils sont immergés dans l'eau profonde d'une rivière qui coule directement de la montagne et vont y rester deux semaines entières. Pour que la peau se détache plus facilement du grain, des ouvriers les remuent de temps en temps. Plus lent est le processus, meilleur sera le résultat. Ensuite, les grains seront laissés trois jours durant sur un séchoir muni d'un système permettant de les couvrir pendant la nuit. Monsieur Jong Sui Son produit du White N°1 Cream Label de Sarawak, un des plus grands poivres blancs du monde. Son parfum puissant et prégnant évoque l'animalité avec en filigrane des notes de sous-bois. Un poivre frais, plus équilibré que puissant et qui développe une finesse remarquable.

 

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M
"Plus lent est le processus, meilleur sera le résultat" Cela s'applique à tout aujourd'hui.<br /> On nous a vendu qu'il fallait aller plus vite, plus vite...<br /> <br /> Je suis de la team "poivre blanc" qui permet d'éviter la coloration des plats et dont le parfum me convient mieux, même le plus banal est meilleur que le banal noir surtout en poudre. J'utilise le Penja du Cameroun.<br /> <br /> White N°1 Cream Label de Sarawak, ce nom m'évoque un whisky ^_^
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V
Je trouve le parfum du blanc bien plus animal que celui du noir, plus boisé. Pour moi, le choix entre les deux dépend vraiment de la nature des plats à relever.
M
Je suis intriguée par cette Rafflésia, son parfum ?? <br /> "Une terre qui absorbe bien la lumière" c'est merveilleux ! Ça me parle. Ce Kuching, lavé par la rivière, séché et qui semble si subtil. Délicat.
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V
La rafflesia sent hélàs très mauvais (viande putréfiée, pour attirer des pollinisateurs) )! <br /> Le parfum du poivre de Sarawak reste fragile à moyen terme en raison des modes de traitement.
I
Tellement intéressant ! J’ai beaucoup aimé les tuteurs de bois de fer. 😊. Mais quelle ignorante j’étais concernant le poivre. Merci pour ces superbes reportages chère Princesse.
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V
Bonjour Irène, <br /> La culture du poivre est quand même moins sophistiquée que celle de la vigne. Il faut d’abord le climat adéquat: tropical, chaud et humide. Ensuite, tout ou presque va se jouer au séchage.